Le vicomte de Roton fut initié au dessin par son grand-père maternel, Pierre de Pinteville, baron de Cernon, colonel de gendarmerie de son état, mais peintre aussi, qui avait étudié la peinture dans l’atelier de Delacroix. Notor commença par travailler au pastel, mais c’est par le dessin à la plume qu’il se fit connaître. Il fut honoré dès 1884 par la médaille de bronze du concours de dessin de la ville de Paris. Ses talents de dessinateur l’amenèrent à illustrer beaucoup de livres, dans des domaines très différents (cf. Annexe II).
Mais l’essentiel de ce travail de dessinateur fut consacré à la Grèce antique. Notre vicomte signalait volontiers que, par son mariage, il était le petit-neveu du comte de Marcellus qui, alors qu’il était secrétaire d’ambassade à Constantinople, acheta à un paysan la Vénus de Milo en 1820 pour l’ambassadeur de France et assura son arrivée en France dans des conditions aventureuses (L’Iliade et L’Odyssée illustrées par la céramique grecque sont dédiées « à Victor Bérard, en souvenir du Comte de Marcellus »).
Ce talent pour le dessin et ce goût pour les images grecques firent que Notor se constitua au fil des ans un port-folio de quelque 2000 dessins à la plume représentant des peintures de vases grecs, de statues et de figurines. Ces dessins si nombreux d’une grande qualité graphique connurent une belle fortune éditoriale. Notor apporta en effet sa collaboration artistique à de nombreux ouvrages ou articles consacrés à l’antiquité, et il publia en son nom propre trois livres qui nous intéressent particulièrement.
Livres auxquels Notor a apporté des illustrations « antiques » :
Edmond Rostand, Pour la Grèce, vers dits à la matinée de la Renaissance du 11 mars 1897, 1897.
Aristophane, Lysistrata, « traduction nouvelle de Ch. Zevort, édition ornée de 107 gravures en couleur, par Notor, d’après les documents authentiques des musées d’Europe », Paris, Eugène Fasquelle éditeur, collection Polychrome, 1898.
Pierre Louÿs, Les Chansons de Bilitis, « traduites du grec. Accompagnées de 300 gravures et de 24 planches en couleur hors texte par Notor, d’après des documents authentiques des musées d’Europe », Paris, Eugène Fasquelle, 1901, deuxième édition 1911.
Jean Bertheroy [Berthe-Corinne Le Barillier], Aspasie et Phryné, avec « 200 dessins archéologiques de Notor, d’après l’Antique », Paris, Les Femmes illustres, Editions d’art et de littérature, 1913.
Nauet, Félix et Bruneau, Les Bacchantes, Ballet d’après Euripide, 1913.
Fénelon, Les Aventures d’Aristonoüs, Paris, Ernest Flammarion éditeur, 1919.
Charles Darmontal, Genèse de son Altesse le Vin, illustrations de Notor, Bordeaux, éditions des Roses, 1931.
Docteur Jean-Max Eylaud, L’Offrande à Bacchus, poème allégorique, illustrations de Notor (Vicomte de Roton), Bordeaux, 1938.
Jean Max Eylaud, La Toison d’or, « tragi-comédie de cinq épisodes, trois actes et deux tableaux, illustrations de Notor (Vicomte de Roton) d’après la céramique grecque », préface de Georges Duhamel [1954 ?].
Articles de journaux ou de revue :
Le Figaro illustré , janvier 1897, « La journée d’une ‘Belle Madame’ au temps de Périclès », par Bertrand Fauvet, « illustrations en couleurs d’après la céramique grecque par De Notor ».
Le Figaro illustré , août 1898, « Athènes s’amuse », par Bertrand Fauvet, avec « illustrations de Notor ».
La revue Le Théâtre , décembre 1899, « Théâtre antique, -Gestes modernes. La Grèce », article signé D.B. De Laflotte, avec des dessins signés de Notor, et d’autres sans signature.
Paris illustré , décembre 1904, n° 30, numéro de Noël, « Carnet d’un reporter au siège de Troie », par Bertrand Fauvet, avec « illustrations de Notor ».
Livres de Notor (voir aussi l’Annexe I) :
G. Notor, La Femme dans l’Antiquité grecque , « avec trente-trois reproductions en couleur et 320 dessins en noir d’après les documents des musées et collections particulières », Paris, Henri Laurens, 1901.
Notor, La Danse dans l’Antiquité grecque , 1911 [monographie extraite de La Femme dans l’Antiquité grecque].
Homère, L'Iliade illustrée par la céramique grecque , « texte et dessins de Notor (Vte de Roton). Préface de Jean-Paul Alaux ». Bordeaux, éditions Delmas, Collections du Galion d'Or, 1942 /1943.
Homère, L'Iliade illustrée par la céramique grecque , « dessins de Notor (Vte de Roton). Préface de Jean-Paul Alaux et préface de Paul Claudel de l’Académie française », Bordeaux, éditions Delmas, 1950.
Homère, L’Odyssée illustrée par la céramique grecque , « dessins de Notor (Vte de Roton). Préface de Jean-Paul Alaux et préface de Paul Claudel de l’Académie française ». Bordeaux, éditions Delmas, 1951.
Ces trois ouvrages, La Femme dans l’Antiquité grecque en 1901, et quelque cinquante ans plus tard L’Iliade et L’Odyssée illustrées par la céramique grecque connurent un succès particulier. Le livre La Femme dans l’Antiquité grecque valut au vicomte de Roton d’être fait Commandeur de l’Ordre royal du Sauveur et de recevoir du roi de Grèce Georges Ier le grand cordon et la plaque de cette décoration. L’Iliade et L’Odyssée illustrées par la céramique grecque furent récompensées en 1952 par le prix d’histoire de l’Académie française et le prix d’archéologie de l’Académie des Beaux arts (fondation Catenacci). Cette double publication donna l ’occasion de conférences remarquées, en particulier à la Faculté des Lettres de Bordeaux, et à la Sorbonne (cf. comptes-rendus de presse, Annexe III). Lors de l a publication de 1950-1951, Notor avait 85 ans. Cette somme homérique venait donc couronner toute une vie de travail, comme il l’exprimait en 1952 : « Il m’aura fallu un demi-siècle et plus de recherches dans les musées, collections particulières et bibliothèques d’Europe pour réaliser mon rêve, mon rêve immense comme la mer, mare immensum , d’Homère illustré à la grecque » .(3)
Dans les années 1890-1920, Notor pouvait être considéré comme l’illustrateur de référence pour les images grecques. Son talent remarquable de dessinateur fit de lui en quelque manière un spécialiste de ces images antiques dans certains milieux éditoriaux, et certainement dans la région de Bordeaux. Pourtant Notor ne trouva pas une réelle et durable reconnaissance dans le monde, alors il est vrai très fermé, des études universitaires classiques. Jusqu’à une période récente, ses livres n’étaient jamais cités dans les bibliographies scientifiques. Son parcours d’amateur éclairé et de dessinateur talentueux le conduisait, il est vrai, à des options qui paraissent aujourd’hui singulières.
(3) Lettre adressée le 5 septembre 1952 à l'archevêque de Bordeaux qui venait de remercier Notor pour l'envoi de son Iliade et de son Odyssée. D'après le brouillon de cette lettre retrouvée par Mme Vinot Préfontaine.